Un salarié protégé refuse la sanction disciplinaire de rétrogradation: l’employeur peut-il le licencier ?

hommeseombresC’est la question à laquelle devait répondre le Conseil d’Etat.

Dans une affaire qui opposait l’Association des Paralysés de France à l’un de ses salariés, gouvernant principal d’un foyer d’accueil et par ailleurs délégué du personnel, l’association avait demandé l’autorisation à l’inspectrice du travail de licencier ce salarié pour faute; l’administration lui avait opposé un refus.

L’association, tout en formant un recours hiérarchique contre cette décision de refus, avait alors parallèlement envisagé de sanctionner M.A…par une mesure de rétrogradation à un poste d’aide médico-psychologique, à la place du licenciement initialement envisagé, ce que l’intéressé avait refusé au motif que cela constituait une modification de son contrat de travail.

Au terme d’un long périple procédural, le Conseil d’Etat a considéré que :

l’inspectrice du travail avait, à juste titre, estimé que le refus par l’intéressé d’accepter la modification du contrat de travail n’était pas fautif.

–  l’inspectrice était toutefois tenue de rechercher, à la lumière de ce refus et compte tenu de l’échelle des sanctions applicables, si ces faits étaient de nature à justifier l’autorisation de licenciement ; qu’elle n’a pas procédé à ce nouvel examen ; que, par suite, l’Association des Paralysés de France est fondée à demander l’annulation de la décision de l’inspectrice du travail lui refusant l’autorisation de procéder au licenciement de M. A…ainsi que de la décision implicite du ministre rejetant son recours hiérarchique contre cette décision.

Ce qu’il faut retenir:

Un salarié protégé peut refuser de se voir appliquer une sanction disciplinaire dès lors que celle-ci a pour conséquence une modification du contrat de travail du salarié (en l’espèce, le salarié, employé en qualité de gouvernant principal était rétrogradé au poste d’aide médico-psychologique – AMP).

Son refus de se voir appliquer cette sanction ne constitue pas, en soi, une faute.

En effet, dès lors que la sanction emporte modification du contrat de travail, le refus du salarié ne peut être constitutif d’une faute. Le principe est que lorsqu’on touche aux éléments du contrat de travail, tels que fonction, horaires, lieu de travail, rémunération… le salarié est en droit de refuser leur modification sans que cela ne constitue une faute.

Que peut alors décider l »employeur ?

Il peut renoncer à sa sanction, y substituer une sanction de moindre niveau, ou bien engager une procédure de licenciement mais en ce cas il doit motiver son licenciement non pas par le refus du salarié, lequel n’est pas fautif (ce ne peut donc être un licenciement pour faute) ; il ne peut le motiver que par les faits qui ont été, à l’origine, commis par le salarié et qui ont amené l’employeur à notifier au salarié, à titre de sanction, une rétrogradation.

Dans l’hypothèse où, compte tenu du refus du salarié, l’employeur déciderait de le sanctionner par un licenciement pour motif disciplinaire, l’autorité administrative est tenue de rechercher si les faits retenus pour justifier la sanction initialement envisagée sont de nature à justifier un licenciement.

Source: Conseil d’Etat, 4ème et 5ème sous section réunies, 3 juillet 2013 n°348099

 

Demander une consultation en ligne avec Maître Lailler
L’auteure de cet article

Cet article a été rédigé par Maître Nathalie Lailler, avocate spécialiste en droit du travail, de la sécurité sociale et de la protection sociale.

Si vous souhaitez une réponse documentée ou un conseil, vous pouvez demander une consultation en ligne avec Maître Lailler ici.

Partagez cet article
Commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Le Blog Pratique du droit du travail est rédigé par Maître Nathalie Lailler, avocate spécialiste en droit du travail, de la sécurité sociale et de la protection sociale.

Maître Lailler est spécialiste en droit du travail, de la sécurité sociale et de la protection sociale (certificat de spécialisation délivré en 2007 par l’EDAGO).
Elle suit une formation permanente dans ses domaines de spécialisation afin d’apporter à ses clients les conseils les plus avisés.

Notre cabinet, spécialisé en droit du travail et de la sécurité sociale, a toujours eu la volonté d’apporter des prestations de qualité à ses clients, ce qui l’a conduit, en 2014, à obtenir la certification ISO 9001.
Nous nous engageons à donner une pleine et entière satisfaction à nos clients, en étant à leur écoute permanente et en leur assurant une qualité de service dans un cadre sécurisant, afin de leur apporter des conseils pertinents et défendre leurs intérêts légitimes.
A cet effet, nous avons mis en place une organisation de qualité et formons régulièrement nos collaborateurs afin de faire évoluer leurs compétences et connaissances.

Consultation en ligne

Le Blog pratique du droit du travail est rédigé par Maître Nathalie Lailler. Des consultations en ligne sont possibles sur son site.

Voulez-vous y accéder ?

Aller sur www.lailler-avocats.fr

Consultation en ligne

Le Blog pratique du droit du travail est rédigé par Maître Nathalie Lailler. Des consultations en ligne sont possibles sur son site.

Voulez-vous y accéder ?
www.lailler-avocats.fr

Maitre Nathalie Lailler, 31 rue Saint-Jean 14000 Caen - 02 31 50 10 11 - Copyright © 2020 Le blog pratique du droit du travail