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Entretien préalable: qui peut assister le salarié et l’employeur?

Quelles sont les règles d’assistance du salarié et de l’employeur dans le cadre d’un entretien préalable à un éventuel licenciement ?

Certaines sont prévues par le code du travail : celles qui concernent l’assistance du salarié; d’autres ont été fixées au gré des décisions de justice: ce sont celles qui concernent l’assistance de l’employeur.

L’entretien préalable:
une obligation lorsqu’un licenciement est envisagé.

L’article L1232-2 du code du travail précise en effet:

L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable.

La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l’objet de la convocation.

L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

L’entretien préalable:
une obligation lorsque la sanction envisagée a une incidence sur la présence du salarié dans l’entreprise, lorsqu’elle affecte sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

L’article L1332-2, inséré dans le chapitre relatif à la procédure disciplinaire, précise :

Lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l’objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Ainsi, dès lors que la sanction envisagée a une incidence sur la présence dans l’entreprise (licenciement), la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié (mise à pied disciplinaire, rétrogradation disciplinaire), le salarié doit obligatoirement être convoqué à un entretien et l’employeur doit lui préciser l’objet de cette convocation.

En revanche, l’employeur n’a pas l’obligation de préciser, dans la convocation écrite, le motif de la sanction envisagée (Cass. soc. 17 décembre 1992 n°89-44651), mais il doit obligatoirement le faire au cours de l’entretien préalable et recueillir les explications du salarié.

L’assistance du salarié lors de l’entretien préalable :
quelles sont les règles fixées par le code du travail ?

L’article L1232-4 du code du travail, relatif à l’assistance du salarié lorsqu’un licenciement est envisagé, précise:

Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise.

Lorsqu’il n’y a pas d’institutions représentatives du personnel dans l’entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative.

La lettre de convocation à l’entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l’adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition.

Il faut donc distinguer deux situations:

1ère situation : l’entreprise a des institutions représentatives du personnel (délégué du personnel, comité d’entreprise, CHSCT, délégué syndical) : le salarié peut uniquement se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise; il peut s’agir d’un représentant du personnel ou bien d’un autre salarié, sans mandat de représentation du personnel.

2ème situation : l’entreprise n’a pas d’institutions représentatives du personnel: le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou par un conseiller du salarié, extérieur à l’entreprise, dont la liste, dressée par le Préfet, est consultable en Mairie ou auprès de la DIRECCTE.

Attention: la lettre de convocation doit préciser à la fois l’adresse de la Mairie du domicile du salarié (s’il est domicilié dans le département où est située l’entreprise ou bien, à défaut, celle de son lieu de travail) ainsi que l’adresse de la DIRECCTE dont dépend l’entreprise. Si l’une des deux adresses n’est pas mentionnée, cela constitue une irrégularité de procédure.

S’il y a un délégué syndical dans l’entreprise, le recours à un conseiller extérieur est écarté (Cass. soc. 19 février 2002  n°00-40657).

Le conseiller du salarié doit être en mesure de justifier de sa qualité en présentant son attestation individuelle, délivrée par les services de la Direction du travail (DIRECCTE).

Voir l’article publié sur le Blog pratique du droit du travail: « le conseiller de salarié doit montrer patte blanche à l’entretien préalable« .

Lorsque le salarié est convoqué pour un entretien préalable à une sanction disciplinaire autre qu’un licenciement (mise à pied disciplinaire ou rétrogradation disciplinaire par exemple) , l’article L.1332-2 alinéa 2 du code du travail précise qu’il « peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise« .

Le recours à un conseiller du salarié, extérieur au personnel de l’entreprise, n’est donc prévu par la loi que dans la seule hypothèse où la sanction envisagée est un licenciement, dans une entreprise qui n’ a pas d’institutions représentatives du personnel.

A noter : le salarié convoqué, tout comme le salarié qui l’assiste, ne peuvent subir aucune perte de rémunération du fait de leur présence à l’entretien préalable.

L’assistance de l’employeur :
des règles fixées par la jurisprudence.

  • L’employeur peut mener personnellement l’entretien ou bien se faire représenter, notamment par une personne ayant délégation de pouvoir pour licencier (par exemple le responsable du personnel, ou le responsable des ressources humaines).

La personne qui représente l’employeur – comme celle qui assiste le salarié – peut établir une attestation.

Les attestations établies par le responsable des ressources humaines et le responsable d’une unité de production qui avaient représenté l’employeur lors de l’entretien préalable, sont recevables dans le cadre d’un procès prud’homal.

Dans cette affaire, le salarié avait reconnu lors de l’entretien préalable qu’il avait insulté son supérieur hiérarchique et les représentants de l’employeur avaient établi une attestation reprenant ce qui avait été dit par le salarié lors de l’entretien. Le salarié avait demandé que ces attestations soient écartées au motif que « nul ne peut témoigner pour soi-même » et que les deux salariés représentaient l’employeur. La Cour d’appel avait retenu cette argumentation et écarté des débats les attestations des deux responsables.

La Cour de cassation censure la décision des premiers juges et rappelle qu’ « en matière prud’homale la preuve est libre, que rien ne s’oppose à ce que le juge prud’homal examine une attestation établie par un salarié ayant représenté l’employeur lors de l’entretien préalable;  il appartient seulement à ce juge d’en apprécier souverainement la valeur et la portée » (Cass. soc. 23 octobre 2013 n°12-22342).

C’était la première fois, à notre connaissance, que la Cour de cassation se prononçait sur la recevabilité d’une attestation établie par le représentant de l’employeur relatant les propos tenus lors de l’entretien préalable.

En revanche, il avait été jugé en 2001, selon une formulation quasiment identique, qu’ « en matière prud’homale, la preuve est libre ; rien ne s’oppose à ce que le juge prud’homal retienne une attestation établie par le conseiller du salarié qui l’a assisté pendant l’entretien préalable et en apprécie librement la valeur et la portée« .

Attention toutefois aux attestations de complaisance : le conseiller qui établit un rapport d’entretien préalable faisant état de propos matériellement inexacts est susceptible d’engager sa responsabilité pénale (Cass. crim. 26 mars 2002 n°01-84215).

  • L’employeur peut se faire assister, mais uniquement par une personne appartenant à l’entreprise

L’assistance par une personne extérieure à l’entreprise (par exemple expert-comptable, avocat, époux non salarié)  rend la procédure de licenciement irrégulière, peu importe l’absence de préjudice pour le salarié (Cass. soc. 28 octobre 2009 n° 08-44241: le fils du dirigeant,  actionnaire de la société et de sa société mère, ancien salarié de l’entreprise, salarié du groupe auquel elle appartient et destiné à prendre la succession de son père, est une personne extérieure à l’entreprise et ne peut assister l’employeur).

  • L’entretien préalable ne doit pas se transformer en enquête ou en procès.

Il a ainsi été jugé que le fait pour l’employeur de se faire assister par deux chefs de service, dont la victime des coups reprochés au salarié, et d’avoir requis la présence de deux autres salariés témoins de l’incident, transformait en enquête l’entretien préalable, le détournant ainsi de son objet (Cass. soc. 10 janvier 1991- n°88-41404).

L’auteure de cet article

Cet article a été rédigé par Maître Nathalie Lailler, avocate spécialiste en droit du travail, de la sécurité sociale et de la protection sociale.

Si vous souhaitez une réponse documentée ou un conseil, vous pouvez demander une consultation en ligne avec Maître Lailler ici.

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