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Coronavirus : le chômage partiel va être massivement élargi, comment le mettre en place ?

Article publié le 17/03/2020 à 05h46 (voir les mises à jour qui seront publiées ultérieurement)

Le Président de la République vient d’annoncer lundi 16 mars différentes mesures, notamment en ce qui concerne l’activité partielle (communément appelée « chômage partiel »), qui sera massivement élargie dès ce mardi 17 mars.

Écoles, restaurants, cafés et magasins fermés, activités en sommeil ou au ralenti, le chômage partiel va s’imposer pour le plus grand nombre afin de maintenir l’emploi des salariés, lorsque aucune autre alternative ne sera possible, notamment au moyen du télétravail.

L’objectif est de maintenir les emplois, le Président ayant affirmé, dans son allocution ce lundi soir « qu’aucune entreprise, quelle que soit sa taille, ne sera livrée au risque de faillite ». La Ministre du travail avait, quant à elle, annoncé plus tôt dans la journée que « pendant la période actuelle c’est zéro licenciement »

L’activité partielle
(ou chômage partiel)


L’employeur peut placer ses salariés en position d’activité partielle lorsque l’entreprise est contrainte de réduire ou de suspendre temporairement son activité en cas notamment de circonstances exceptionnelles (article R5122-1 du code du travail).

Toutes les entreprises dont l’activité est réduite du fait du coronavirus et notamment celles (restaurants, cafés, magasins, etc.) qui font l’objet d’une obligation de fermeture en application de l’arrêté du 14 mars 2020 sont éligibles au dispositif d’activité partielle.

L’activité partielle permet d’éviter des licenciements et la Ministre du travail, plus tôt dans la journée du lundi 16 mars, a déclaré que « pendant la période actuelle c’est zéro licenciement« .

En pratique, comment mettre en place l’activité partielle ?

Le serveur « activité partielle » est à nouveau accessible depuis ce mardi 17 mars.

Consulter les représentants du personnel ?


Dans les entreprises de plus de 50 salariés, l’employeur doit consulter les représentants du personnel avant la mise en place de l’activité partielle. La discussion porte sur les motifs de recours, les catégories professionnelles et les activités concernées, le niveau et les modalités de mise en œuvre des réductions d’horaire, les actions de formation envisagées ou tout autre engagement pris par l’entreprise.

Dans les autres entreprises, l’employeur doit informer directement ses salariés de la mise en activité partielle.

Mais en pratique, comment concilier cette obligation de consultation du CSE avec l’impossibilité de se réunir ? comment réunir les salariés alors que des mesures de confinement sont mises en place ? comment informer le CSE, conformément à la loi, au moins 3 jours avant la tenue de la réunion lorsqu’on doit mettre en place l’activité partielle parfois du jour au lendemain ?

On peut imaginer que dans cette situation exceptionnelle les entreprises vont s’affranchir de cette consultation préalable.

Le document Questions / Réponses du 9 mars, le Ministère du travail, précise (page 19) semble l’autoriser : « Le recours à la visioconférence est encouragé si nécessaire pour éviter les contacts physiques et si l’urgence l’exige, l’employeur peut prendre des mesures conservatoires d’organisation du travail avant d’avoir effectué la consultation. »

Comment effectuer la demande d’activité partielle ?

Le site « Activité partielle » du ministère du travail explique comment procéder pour mettre en œuvre l’activité partielle. Il s’agit d’une procédure dématérialisée.

Sous réserve de modifications à venir, cette procédure se déroule actuellement de la manière suivante :


La notice en date du 2 mars qui a été communiquée aux Directions régionales du travail et de l’emploi précise : « En quelques clics, vous pouvez créer votre compte et déposer votre demande d’autorisation préalable en précisant le motif de « Autres circonstances exceptionnelles » puis, sous motif « coronavirus ». Pour cela, vous pouvez consulter l’encadré en fin de questionnaire qui présente, pas à pas, les démarches à effectuer en ligne sur le site. »
Attention : cette notice a été rédigée le 2 mars et certaines dispositions ont été modifiées depuis et vont encore évoluer.

Le serveur permettant de s’inscrire en activité partielle a été saturé ce lundi 16 mars après-midi compte tenu de l’afflux massif des demandes et le ministère annonçait qu’il était fermé jusqu’au mardi 17 mars matin pour permettre le bon déroulement des travaux.

Le serveur « activité partielle » est à nouveau accessible depuis ce mardi 17 mars.

En toute hypothèse, il n’y a pas lieu de paniquer car le ministère a annoncé lundi 16 mars qu’il accordait aux entreprises 30 jours pour déclarer leur activité partielle, avec effet rétroactif (lire le communiqué de presse).

Les entreprises bénéficient donc de 30 jours pour déposer leur demande d’activité partielle et pourront dès demain se consacrer pleinement à la mise en œuvre des mesures qui sont nécessaires à l’organisation de leur activité.

2ème étape :
la demande préalable d’activité partielle


Lors de sa demande d’activité partielle, l’entreprise doit fournir les éléments suivants :

  • le SIRET (ATTENTION : il est impératif que le n° soit correctement renseigné. En cas d’erreur, le compte ne pourra pas être créé);
  • la dénomination de l’établissement;
  • son adresse (libellé de la oie, code postal, ville);
  • son adresse électronique (ATTENTION : cette adresse sera votre point d’entrée avec l’administration en cas d’erreur de saisie, vous ne pourrez pas recevoir les notifications de décisions);
  • son numéro de téléphone fixe;
  • les coordonnées de la personne à contacter (nom, prénom, adresse électronique et numéro de téléphone fixe): elle sera destinataire de l’ensemble des décisions relatives à vos démarches;
  • le nombre de salariés de l’entreprise ;
  • l’effectif concerné par l’activité partielle et le volume d’heures prévisionnel demandé pour la période ;
  • un RIB indiquant les 8 premiers caractères du BIC ;
  • une question secrète et sa réponse;
  • l’avis du Conseil social et économique (comme indiqué précédemment, il faudra avoir des précisions complémentaires du Ministère car il apparait difficilement possible, en pratique, compte tenu de la situation actuelle, de recueillir l’avis du CSE.)

La demande d’activité partielle doit par ailleurs indiquer précisément les effets de l’épidémie Covid19 sur l’activité de l’entreprise.

3ème étape :
la décision
d’autorisation d’activité partielle


L’unité départementale territorialement compétente de la DIRECCTE (Direction régionale du travail et de l’emploi) adresse sa décision via le portail dans les 48 heures (délai raccourci puisqu’il était avant de 15 jours).

En principe, l’autorisation d’activité partielle est accordée en moins de 48 heures. Le Ministère annonce cependant que « malgré leur mobilisation, compte tenu de l’afflux prévisible de demandes, il est possible que ces délais s’allongent de quelques jours. »

Quoiqu’il en soit, les aides versées aux entreprises au titre du chômage partiel seront calculées à partir de la date de demande, même si l’autorisation de l’administration intervient quelques jours plus tard. »

La décision signée par le Préfet est notifiée à l’employeur.

Elle doit être communiquée au CSE.

4ème étape :
la demande d’indemnisation


A réception de la décision autorisant l’activité partielle, la demande d’indemnisation peut être déposée sur le portail « activité partielle
. »

Du fait de l’absence de visibilité sur la durée de l’épidémie, vous pouvez faire une demande courant jusqu’au 30 juin 2020.

La demande doit être accompagnée des justificatif suivants (article R5122-5 du code du travail) :

1° Des informations relatives à l’identité de l’employeur ;

2° La liste nominative des salariés concernés ainsi que le numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques ;

3° Les états nominatifs précisant notamment le nombre d’heures chômées par salarié.

ATTENTION : l’activité partielle ne couvre que la durée légale du travail (35 heures). Par conséquent, pour les salariés qui travaillent sur une durée hebdomadaire supérieure à 35 heures, il faut procéder à un calcul afin de déterminer le nombre d’heures indemnisables au titre de l’activité partielle.

Exemple : Un salarié travaille sur une base de 39 heures par semaine et l’employeur décide de le faire chômer deux jours par semaine. Il devra procéder au calcul suivant :

39h / 5 jours = 7.8 heures par jour
Lundi, mardi, mercredi travaillés = 7.8 heures * 3 jours = 23.4 heures travaillées
35 heures légales – 23.4 heures travaillées
= 11.6 heures indemnisables au titre de l’activité partielle

L’employeur devra donc inscrire dans la demande d’indemnisation :
23.4 heures travaillées ;
11.6 heures chômées.

Son indemnisation sera de 89.784 euros pour les entreprises de moins de 250 salariés (11.6 heures *7.74€) et 83.868 euros pour les entreprises de plus de 250 salariés (11.6 heures *7.23€).

ATTENTION : ce taux correspond à une indemnisation à 70% et cet exemple devra donc être modifié pour tenir compte de l’indemnisation à 100% qui est annoncée par la Ministre.

Il n’y a pas de délai de carence : l’activité partielle peut être mobilisée dès la 1ère heure dite « chômée ».

Pour les établissements appliquant un accord d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine et inférieure à l’année, l’employeur y joint, dans le cas où il ne souhaite pas un remboursement à la fin de la période, une demande de remboursement mensuel.

L’entreprise peut être amenée à fournir à l’unité départementale par voie dématérialisée les bulletins de paie des salariés faisant clairement apparaître le nombre d’heures non travaillées.

Pour faciliter la prise en charge de la demande:

  • il faut absolument faire apparaitre la circonstance « coronavirus » dans la demande,
  • contrôler les SPAMS dans l’éventualité où les courriels envoyés via la plateforme y soient stockés,

Après vérification, l’Agence de services et de paiement procède au paiement de l’allocation d’activité partielle (article R 5122-5 du code du travail).

5ème étape :
le versement de l’allocation d’activité partielle à l’entreprise


Les heures indemnisables correspondent aux heures non travaillées par les salariés.

En l’état des dispositions applicables, la durée de travail à prendre en considération pour décompter le nombre d’heures indemnisables au titre du chômage partiel est de 35 heures hebdomadaires.

Les congés payés, jours fériés et jours RTT ne sont pas éligibles à l’activité partielle. Il revient à l’employeur de les rémunérer à taux plein.

Sous réserve des mesures qui seront annoncées mardi 17 mars, et en l’état des dispositions du Code du travail (article R 5122-8), certains salariés sont exclus du bénéfice de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle, c’est à dire principalement les salariés en forfait jours ou heures.

NB : les travailleurs indépendants sont également exclus du bénéfice de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle. Des mesures devraient être annoncées pour qu’ils soient indemnisés, sans doute sous la forme d’arrêts de travail.

Aide : quel montant versé à l’entreprise ?

ATTENTION : les informations ci-dessous ont évolué et nous vous invitons à lire les articles publiés après le 16 mars sur le Blog pratique du droit du travail.


Pendant les périodes autorisées d’activité partielle, l’employeur doit verser une indemnité équivalent habituellement à 70% de la rémunération antérieure brute des salariés.

Comment est-il ensuite indemnisé ?

Le Président avait déclaré dans son allocution du 12 mars dernier qu’il y aurait un mécanisme « exceptionnel et massif » de chômage partiel et qu’il faudrait « aller beaucoup plus loin » que le niveau d’indemnisation habituel, et dans la foulée, Muriel Pénicaud, ministre du travail avait annoncé à l’émission « 8h30 France Info » du 13 mars que 100% du chômage partiel serait pris en compte par le budget du ministère du Travail.

Dans un communiqué du 16 mars, elle vient d’annoncer qu’un décret serait pris dans les tous prochains jours pour réformer le dispositif d’activité partielle afin de couvrir 100% des indemnisations versées aux salariés par les entreprises, dans la limite de 4,5 SMIC (le smic mensuel brut est fixé en 2020 à 1 539,42 euros, soit 1 185,35 euros nets. )

ATTENTION : les informations ci-dessous ont évolué et nous vous invitons à lire les articles publiés après le 16 mars sur le Blog pratique du droit du travail.

Pour accompagner le versement de l’indemnité compensatrice aux salariés placés en activité partielle, l’employeur bénéficie d’une allocation forfaitaire cofinancée par l’Etat (environ 63%) et par l’Unédic (37%) qui est habituellement de :
7.74 euros pour les entreprises de moins de 250 salariés ;
7.23 euros pour les entreprises de plus de 250 salariés,
ATTENTION : Ces montants seront revus à la hausse dans les prochains jours, il faut attendre le décret annoncé par la Ministre lundi 16 mars.

Un simulateur d’activité partielle

Un simulateur permet aux entreprises de connaître immédiatement les montants estimatifs d’indemnisation qu’elles peuvent escompter en cas de recours à l’activité partielle.


ATTENTION: il n’avait pas été encore mis à jour en fin de soirée, lundi 16 mars, et la simulation obtenue ne prenait pas encore l’annonce d’une indemnisation à 100%.

Quelle conséquence sur le contrat de travail ?

Pendant l’activité partielle, le contrat est suspendu mais non rompu.

Ainsi, sur les heures ou périodes non travaillées, les salariés ne doivent être ni sur leur lieu de travail, ni à disposition de leur employeur, ni se conformer à ses directives.

Quelle rémunération pour les salariés ?

ATTENTION : les informations ci-dessous ont évolué et nous vous invitons à lire les articles publiés après le 16 mars sur le Blog pratique du droit du travail.

Le contrat de travail étant suspendu, les salariés perçoivent pendant la période d’activité partielle, une indemnité compensatrice versée par leur employeur.

Cette indemnité compensatrice correspond habituellement à 70% de la rémunération brute des salariés (soit 84% du salaire net), pourcentage qui peut être augmenté par l’employeur.

Comment rédiger les feuilles de paie ?

Il faut bien préciser les termes « Activité partielle » sur les bulletins de salaire ou sur tout document permettant à la fois d’informer les salariés et de fournir un document justificatif en cas de contrôle.

Il est demandé de préciser les jours non travaillés au titre de l’activité partielle.

Si les payes sont déjà traitées, les heures chômées pourront être régularisées sur le mois suivant . Un rappel de mention « Activité partielle» sera alors indiqué sur le bulletin de paie du mois suivant.

Contrôle de l’État sur l’indemnisation

Toute fraude à l’activité partielle est susceptible d’entraîner des sanctions administratives telles que celles prévues à l’article L8272-1 et suivants et D8272-1 du code du travail.

L’employeur qui ne demande pas ou qui n’obtient pas l’autorisation de l’administration peut être condamné au paiement de compléments de salaire ou de dommages et intérêts. Les sommes à payer correspondent soit au seul montant des indemnités non versées, soit à la totalité des salaires non perçus pendant la période de chômage. (voir documentation URSSAF figurant sur le site au 17 mars).

Le contrôle de l’État peut se faire sur la base des fiches de paie justifiant que le salarié ne répondait pas aux dispositions de l’article L3121-1 du code du travail, lequel définit le temps de travail effectif.

L’auteure de cet article

Cet article a été rédigé par Maître Nathalie Lailler, avocate spécialiste en droit du travail, de la sécurité sociale et de la protection sociale.

Si vous souhaitez une réponse documentée ou un conseil, vous pouvez demander une consultation en ligne avec Maître Lailler ici.

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