Rupture conventionnelle pendant un accident du travail : c’est possible
Jusqu’en 2014, la Cour de cassation et plusieurs Cours d’appel considéraient qu’au cours des périodes de suspension consécutives à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l’employeur ne pouvait faire signer au salarié une rupture d’un commun accord du contrat de travail, une telle résiliation du contrat devant être déclarée nulle (Cass. soc. 4 janvier 2000 n°97-44566).
Les juridictions s’appuyaient sur la rédaction de l’article L122-32-2 du code du travail, devenu l’article L1226-18 qui précise que l’employeur ne peut rompre le contrat d’un salarié victime d’un accident ou d’une maladie professionnelle au cours des périodes de suspension du contrat que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit d’un cas de force majeure. A défaut, la rupture du contrat est nulle (article L1226-13).
De plus, une circulaire de la Direction générale du travail en date du 17 mars 2009 précisait que la rupture conventionnelle ne pouvait être signée pendant une période de suspension du contrat, par exemple durant le congé de maternité ou pendant l’arrêt imputable à un accident du travail ou une maladie professionnelle (circulaire DGT n°2009-04 du 17 mars 2009 relative à la rupture conventionnelle d’un contrat à durée indéterminée).
- En 2014, la Cour de cassation a jugé que, sauf fraude ou vice du consentement, la rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours de la période de suspension du contrat consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle (Cass. soc. 30 septembre 2014 n°13-16297). La Cour de cassation a ainsi approuvé la Cour d’appel de Lyon qui avait jugé que l’article L1226-9 du code du travail prohibe uniquement la rupture unilatérale du contrat de travail.
Il ne s’agit pas vraiment d’un revirement de jurisprudence puisque, la décision de 2000 concernait une rupture amiable (la rupture conventionnelle a été instituée ultérieurement, par la loi du 25 juin 2008) alors que celle de 2014 concernait une rupture conventionnelle homologuée, c’est-à-dire validée par la direction du travail, et bénéficiant d’un délai de rétractation, destiné à garantir la liberté du consentement des parties.
L’apport principal de cette décision du 30 septembre 2014 est de recentrer le débat sur la liberté du consentement des parties, telle qu’évoquée dans l’article L1237-11 du code du travail :
« L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.
La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.
Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties« .
Il est à noter que la décision rendue par la Cour de cassation en décembre 2014 a été intégrée par l’administration du travail. En effet, en 2010, le site service public.fr listait les « situations rendant impossible la rupture conventionnelle » au nombre desquelles figurait l’arrêt de travail pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle ». Cette situation a été supprimée de la liste (service-public.fr).
En septembre 2016, la Cour d’appel de de Bourges a fait application de la jurisprudence de la Cour de cassation dans une situation où la rupture conventionnelle avait été signée pendant l’arrêt de travail consécutif à un accident du travail (CA Bourges, ch.soc. 9 septembre 2016, n°14/01495).
Ce qu’il faut retenir : peu importe qu’une rupture conventionnelle soit signée au cours d’une période de suspension du contrat faisant suite à un accident du travail ou une maladie professionnelle, dès lors qu’il n’y a ni fraude, ni vice du consentement.
Voir les articles connexes
- Le salarié qui rompt son CDD avant le terme peut-il être condamné à indemniser son employeur ?
- Rupture anticipée du contrat à durée déterminée : quelles conséquences ?
- La rupture conventionnelle n’est pas compatible avec le Contrat de sécurisation professionnelle
- Démission et maternité : quels sont les droits des salariés ?
- Une rupture conventionnelle peut-elle intervenir après le congé de maternité ?
- La non remise de l’attestation POLE EMPLOI cause au salarié un préjudice qui doit être réparé
- Rupture conventionnelle pendant un arrêt pour maladie non professionnelle: c’est possible
- Licenciement pour inaptitude après un accident du travail: ne pas oublier la consultation des délégués du personnel
- Indemnité compensatrice de préavis versée après une inaptitude pour AT: quelles conséquences sur les délais de prise en charge par le Pôle emploi ?
- Documents de fin de contrat : leur remise est obligatoire
Laisser un commentaire
Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *
Commentaires (23)